Paléolithique final

Après les glaces

Les toutes premières traces d’activités humaines que l’on peut identifier à Roquemissou sont celles de groupes de chasseurs-cueilleurs qui, vers 11 500 ans avant notre ère, s’installent au pied de la paroi, probablement dans le cadre de parcours saisonniers. Ils n’ont laissé que des traces discrètes de leur présence, celles de foyers installés directement sur le sable, au pied de la paroi. La manière dont ils fabriquent leurs outils en silex, ainsi qu’un petit galet gravé décoré de quelques lignes incisées, sont caractéristiques de l’Azilien, vaste entité culturelle du Sud de la France.

Les outils en silex produits par les populations préhistoriques sont particulièrement riches d’informations. La nature des roches utilisées nous renseigne par exemple sur les lieux de prélèvement, et par conséquent, sur les parcours de ces populations. Les granites, les grès, les schistes ou les calcaires utilisés pour le macro-outillage se rapportent ainsi à des étages géologiques très différents qui n’affleurent dans les environs du site qu’à des endroits bien particuliers. Le quartz, abondant dans le lit des rivières ou dans des filons proches, a été fréquemment utilisé à toutes les périodes. L’essentiel des outils a toutefois été réalisé sur des silicites, roches sédimentaires siliceuses comme le silex, la calcédoine, la chaille, etc., formées anciennement dans des milieux très variés : marins, lacustres ou palustres. D’autres matières particulières ont également été exploitées, comme les cinérites de Réquista, formées par l’accumulation de cendres lors d’éruptions volcaniques. Ces dépôts, très localisés, se trouvent à vol d’oiseau à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest du site. La plupart des roches utilisées aux différentes périodes d’occupation du site sont accessibles en moins d’une heure de marche (5 km) ou en une demi-journée (20 km). À cette distance, il est encore possible de faire l’aller-retour dans la journée. Au-delà, il faut envisager des déplacements plus longs, nécessitant une logistique plus complexe mettant en jeu des capacités d’autonomie ou des points relais qui impliquent un fonctionnement en réseau.

Les matières premières utilisées par les groupes de l’Azilien, vers 11 500 ans avant notre ère, montrent qu’ils étaient mobiles et parcouraient des distances de plusieurs dizaines de kilomètres. Leur fréquentation du site de Roquemissou devait sans doute être limitée dans le temps, inscrite dans un parcours plus vaste. À cette période, la végétation est complètement différente de celle d’aujourd’hui. Les charbons de bois identifiés livrent l’image d’une forêt de pins sylvestres, essence très tolérante à la sécheresse et au froid, que l’on rencontre aujourd’hui en montagne et dans les régions tempérées à froides d’Eurasie. Quelques autres taxons héliophiles complètent ce tableau ; ce sont des arbustes de la famille du prunellier et de l’amandier, les Rosacées prunoïdées, et le noisetier, annonciateur de conditions plus clémentes. La végétation est ouverte, le climat plus sec et plus froid qu’aujourd’hui et des troupeaux de chevaux sauvages caracolent au sein de ces espaces. À ce jour peu fouillées car étant les plus profondes, ces premières occupations de Roquemissou restent encore assez peu documentées. Quoi qu’il en soit, le site est ensuite abandonné pendant plusieurs siècles. C’est probablement durant le 10e millénaire que reviennent de nouveaux groupes de chasseurs-collecteurs nomades ou semi-nomades, appartenant aux traditions du Laborien. Là aussi, quelques foyers discrets témoignent de leur présence, dans un environnement qui reste encore peu végétalisé.


Évocation libre de l’occupation du site de Roquemissou lors des dernières occupations paléolithiques du gisement (Laborien), aux alentours de 9500 ans avant notre ère (aquarelle J. Caro)
Évocation libre de l’occupation du site de Roquemissou lors des dernières occupations paléolithiques du gisement (Laborien), aux alentours de 9500 ans avant notre ère (aquarelle J. Caro).